Le programme « Actions écoles » de CAMELEON existe depuis 2014 et a pour objectifs de sensibiliser les enfants sur leurs droits pour qu’ils soient mieux protégés contre les violences. Il a été renforcé en septembre 2019 avec une approche globale de prévention intégrant les parents et les encadrants. Depuis un an, nous avons réalisé 64 interventions dans une dizaine d’établissements auprès de plus de 1300 élèves.
A l’occasion du 20 novembre, journée internationale des droits de l’Enfant, nous dressons un premier bilan de nos actions sur le terrain et souhaitons partager plusieurs recommandations auprès du gouvernement. Il est d’autant plus urgent d’agir que la crise sanitaire et le confinement ont exacerbé les risques de violences intrafamiliales et de cyberpédocriminalité.
Nos constats
Interventions essentiellement au niveau primaire soit auprès des 6-10 ans
1- La méconnaissance des élèves de leurs droits et du 119
Plus de 30 ans après l’adoption de la CIDE et malgré les affiches du 119 obligatoirement présentes dans les établissements, moins d’un tiers des enfants interrogés (27%) savent qu’ils ont des droits et connaissent le numéro Allô Enfance en Danger. Néanmoins, la plupart savent qu’ils ont le droit d’être protégés et que les parents n’ont pas le droit de frapper leur enfant, même si cela n’est pas toujours respecté dans leur famille. Lors de nos interventions, il arrive fréquemment que des enfants révèlent des violences subies, sans qu’ils les identifient toujours comme de la violence.
D’autres comprennent le caractère anormal de ce qu’ils vivent mais préfèrent se taire car ils expriment aussi leurs craintes d’être séparés de leurs parents (à cause des services sociaux ou des policiers). Nous constatons cependant des progrès suite aux récentes campagnes de communication sur le 119 lors du confinement et appelons à poursuivre ces initiatives pour en accroître la visibilité.
2- Des enfants non avertis sur les situations à risques et exposés très tôt aux cyberviolences
Lorsque nous évoquons des situations à risque ou inquiétantes, beaucoup d’enfants ne sont pas en capacité d’identifier un danger. Ces enfants qui ont notamment entre 6 et 10 ans ont du mal à imaginer qu’il existe des adultes mal intentionnés pouvant mentir pour gagner leur confiance. Par ailleurs, les enfants sont exposés dès le CE2 aux risques d’Internet et des réseaux sociaux. La plupart jouent, chattent et regardent des vidéos en ligne (Fortnite et Youtube), parfois sans la surveillance de leurs parents.
Au niveau du collège, l’utilisation des réseaux sociaux et les groupes de discussions par messagerie instantanée ou serveurs privés (WhatsApp, Discord, Twitch) augmentent les risques d’exposition à la pornographie mais aussi de cyberharcèlement, notamment à caractère sexuel. Les jeunes peuvent aussi parfois exposer leurs camarades à leur insu en diffusant des photos ou des informations personnelles sans leur consentement.
Nous les sensibilisons aux bonnes pratiques numériques pour protéger leur vie privée et à l’importance de discuter de ce qu’ils y font avec leurs parents.
3- Des enseignants et des parents pas assez informés sur la cyberpédocriminalité
Dans le cadre de ce second confinement, durant lequel nous continuons à intervenir dans les écoles, les enfants révèlent fréquemment des violences, souvent au sein même de leur foyer où ils devraient trouver amour et protection.
Cela a pu favoriser la prise de conscience de certains enseignant.e.s sur leur rôle en matière de prévention. Toutefois, ces derniers ont parfois le sentiment d’être dépassés et de ne pas être assez outillés pour accueillir la parole des enfants ou détecter des violences. En réponse à ces besoins, nous avons développé des outils pédagogiques et un module de formation à destination des encadrants scolaires pour les aider à mieux protéger les enfants.
Enfin, nous constatons que de plus en plus d’enfants parlent à des inconnus et se mettent en danger sur Internet ou les réseaux sociaux dès le CP ou le CE1 ! Lorsque les enfants expliquent avoir déjà reçu des demandes de photos / d’informations personnelles / de rencontres / de sollicitations sexuelles de la part d’adultes, les enseignants sont souvent très surpris et effarés des dangers auxquels sont exposés leurs (très jeunes) élèves. La majorité des parents ignorent également les risques que prennent leurs enfants en allant sur Internet ou en jouant à des jeux vidéo.
C’est pourquoi nous concevons des clips pédagogiques à destination des parents pour les informer et les soutenir dans leur rôle d’accompagnement de leurs enfants dans leurs pratiques numériques. Ils permettront de dialoguer en famille avec un discours adapté et de manière ludique sur les risques et ressources 2.0.
4- Nos recommandations
Il y a 1 an, le Secrétaire d’Etat chargé de l’Enfance et des Familles, Monsieur Adrien Taquet, dévoilait la stratégie 2020-2022 du gouvernement contre les violences faites aux enfants. Une des mesures était de renforcer l’action de prévention du secteur associatif pour sensibiliser les enfants en milieu scolaire et former leurs encadrants. C’est précisément l’objet de nos interventions qui répondent à la demande des pouvoirs publics mais également aux aspirations de la société civile.
Pour sensibiliser davantage d’enfants et d’encadrants mais aussi les parents et le grand public, notamment contre la cyberpédocriminalité, nos recommandations sont les suivantes :
- Rendre obligatoire des séances d’information et de prévention sur la CIDE et les droits de l’Enfant (LIEN : https://www.cameleon-association.org/2019/11/20/cide-et-droits-enfant/) en milieu scolaire et périscolaire pour que les enfants connaissent leurs droits et soient mieux protégés contre les violences
- Modération obligatoire des espaces virtuels pour les jeunes avec des référents formés sur les enjeux de cyberviolences et soutien aux programmes de prévention par les jeunes eux-mêmes
- Campagnes nationales (TV, réseaux sociaux, presse, radio…) et outils de communication pour sensibiliser le grand public, les parents et les jeunes sur les droits de l’Enfant, les violences faites aux enfants et la cyberpédocriminalité
Découvrez l’ensemble de nos revendications ici.