Dans le cadre de notre partenariat avec SNCF Réseau, plusieurs membres de notre équipe ont été interviewées sur leur engagement avec et pour CAMELEON. Découvrez aujourd’hui le témoignage de Laurence Ligier notre Directrice Fondatrice.
Pourquoi avoir créée l’association ?
Ma première mission humanitaire aux Philippines remonte à 1992. J’avais 20 ans, j’étais étudiante en droit, je n’avais jamais voyagé et je souhaitais découvrir un pays et une culture, tout en me rendant utile. Je me suis tournée vers une petite association qui m’a envoyée aux Philippines dans le cadre d’un chantier de solidarité internationale. Sur place, j’ai été marquée par les enfants et les familles que j’ai vu survivre dans la rue.
Un état de pauvreté extrême et pourtant toujours le sourire aux lèvres et une joie apparente. J’ai mené ma mission qui était d’aider à la construction d’un atelier de tissage de fibres d’ananas dans la jungle, avec les femmes d’une communauté rurale. Particulièrement touchée par l’accueil chaleureux des Philippins, c’est tout naturellement que l’été suivant j’y suis retournée pour participer à un autre chantier : la construction d’une salle de classe.
Sur place, une association philippine m’a proposé de m’engager pour une mission bénévole d’un an dans le cadre d’un programme d’éducation à destination des enfants des rues d’Iloilo. J’ai relevé le défi, vécu dans une famille en bidonville et c’est alors que j’ai été confrontée à la terrible réalité des enfants des rues. J’ai vu des enfants chiffonniers, drogués, prostitués, des enfants en prison, d’autres envoyés par leurs familles pour mendier ou exploités au travail…
Cette réalité m’a profondément marquée et je me suis dit « que puis-je faire de plus ? ». Les services sociaux et les bénévoles philippins avec qui j’étais en mission m’ont demandé de lever des fonds en Europe pour les aider à sortir les enfants de la rue et notamment les filles qui étaient en minorité mais plus vulnérables, et pour la plupart victimes de violences physiques et sexuelles. C’est ainsi qu’est née l’association CAMELEON que j’ai créée en 1997 aux Philippines puis en 1998 en France pour faire face à un besoin criant et pour répondre à un appel.
Depuis plus de 24 ans, CAMELEON aide, protège et réhabilite des petites et jeunes filles victimes de violences sexuelles qui sont placées par les services sociaux philippins dans nos maisons d’accueil. Nous avons également développé une mission sociale en France pour lutter contre les violences sexuelles faite aux enfants. Notre mission s’articule autour de la sensibilisation du grand public, de la prévention des violences, de la protection et accompagnement des victimes ainsi que du plaidoyer auprès des autorités publiques.
Pourquoi CAMELEON ?
C’est une métaphore. Le caméléon avance doucement, mais sûrement, il bascule parfois mais s’accroche et ne tombe jamais. Je voulais un nom que les gens retiennent et qui symbolise l’adaptation à un nouvel environnement, l’expression des émotions et la métamorphose. L’idée véhiculée étant que les jeunes filles placées chez nous, marquées physiquement et psychologiquement, se transforment au fil des années. Notre slogan « changing colors, changing live » est la promesse. 3. Pourquoi est-il si important de s’engager ?
L’engagement est pour moi « essentiel », qu’il soit au service d’une cause ou d’une personne. Se battre pour des idées ou contre des injustices, utiliser ses compétences et son réseau, être acteur du changement au sein de la société, c’est le sens porté par l’engagement.
Et quand nos actions peuvent aider les plus vulnérables qui sont souvent marginalisés, exclus et qui n’ont pas de voix, alors elles doivent être engagées avec sincérité, force et conviction. Que ce soit à court terme ou sur la durée, notre engagement peut réellement changer des destins et parfois même sauver des vies. Alors pourquoi attendre plus longtemps ? I est urgent d’agir pour venir en aide à l’enfance en danger.
Quel ont été vos meilleurs souvenirs ? Que retenez-vous de ces années passées à œuvrer pour CAMELEON ?
J’ai écrit un livre qui s’appelle Princesses des rues, pour relater les 15 premières années de mon engagement humanitaire. Le tome 2 reste à écrire sur les 15 années qui ont suivi.
Je garde beaucoup de souvenirs marquants de cette aventure CAMELEON : d’abord l’inauguration il y a 24 ans de notre premier centre d’accueil puis l’arrivée des 7 premières filles. Il y a également les prix reçus, qui symbolisent la reconnaissance par les Etats philippins français de ce que mes équipes et moi-même avons pu réaliser malgré les risques, à la force du travail et de la détermination. Puis le succès des filles qui obtiennent une à une leurs diplômes et décrochent leurs premiers emplois.
Ce qui maintient depuis toutes ces années ma motivation et ma persévérance, c’est sans doute le sourire et le courage des filles qui surmontent leurs traumatismes et en font une force. Les moments forts pour moi correspondent aussi à ces instants de prise de parole dans le cadre du plaidoyer, par exemple une de nos jeunes filles qui s’est rendue à New York avec une délégation de jeunes sélectionnés pour représenter leur pays afin de défendre les droits de l’enfants sur la scène internationale. Placée à CAMELEON à l’âge de 9 ans, elle est aujourd’hui salariée de l’association et ambassadrice des droits de l’Enfant.
Quel regard portez-vous sur l’avenir de l’association ainsi que celui des enfants accompagnés ?
En tant que fondatrice, je suis fière de voir les parcours vie et les succès de nos bénéficiaires qui ont fait preuve de résilience. La nouvelle génération porte l’ADN et les valeurs de CAMELEON, assurant ainsi la prise de relai pour faire perdurer les missions de l’association. La pérennité institutionnelle et financière est un des objectifs que nous nous fixons aux Philippines.
En France, nous n’avons pas de structures d’accueil pour les victimes de violences sexuelles, mais nous veillons à intensifier nos actions de prévention notamment au sein des écoles. CAMELEON a récemment été labellisé par le Ministère des solidarités et de la santé pour ses actions en périscolaire et extrascolaire que nous veillerons à développer. Dans l’avenir, nous espérons créer un tiers-lieu où nous mettrons en place notre expertise terrain et l’échange de bonnes pratiques. Mon ambition est de mettre en pratique en France, le savoir-faire développé aux Philippines (cirque, art thérapie, parrainage, jeunes ambassadeurs, médiation par l’animal…).
A plus long terme, nous espérons pouvoir labéliser notre programme pour que d’autres institutions puissent le dupliquer dans d’autres territoires. Cela permettrait notamment de démultiplier notre action et d’aider plus d’enfants dans le besoin.
Deux mots pour qualifier cette aventure :
Histoire de Vie(s) : La mienne, celles des enfants et celles de tous ceux qui s’engagent pour CAMELEON parce que cette aventure humaine et unique nous marque tous.
Avez-vous un message à adresser à nos collaborateurs ?
Je compte sur votre engagement à titre personnel ou en collectif. Chacun peut contribuer à sa façon en fonction de ses moyens, de ses compétences ou de son temps. Nous avons régulièrement besoin de bénévoles, donateurs, mécènes ainsi que de parrains et marraines pour donner aux enfants l’espoir d’un avenir meilleur.
Ensemble, nous pouvons faire plus, plus vite et mieux. Engagez-vous à nos côtés sans attendre, seuls, avec vos collègues ou en famille pour parrainer un enfant. Vous serez les bienvenus dans la grande famille CAMELEON !